"Para mi solo recorrer los caminos que tienen corazaon, cualquier camino que tenga corazon. Por ahi yo recorro, y la unica que vale es atravesar todo su largo. Y por ahi yo recorro mirando, mirando, sin aliento."

Briser les routines de sa vie

- Chaque jour, vers midi et vers six heures du soir et vers huit heures du matin tu t'inquiètes parce que pour toi c'est l'heure de manger, même si tu n'as pas faim, précisa-t-il malicieusement. Pour te révéler tes routines, il m'a suffi de faire la sirène. Tu as été entraîné pour faire ton travail à un signal donné. Et maintenant continua-t-il, de la chasse tu fais une routine. Tu t'es déjà établi dans une habitude de chasse. Tu parles à certains moments, tu manges à d'autres, et à une heure précise tu t'endors.

Pourquoi protester ? Don Juan décrivait ainsi exactement ma vie et j'usais du même principe pour tout ce que j'entreprenais. Malgré tout j'avais la conviction d'avoir une vie moins routinière que la plupart de mes amis et connaissances.

- Tu en sais un bout sur la chasse, reprit-il, et pour toi il doit être facile de comprendre qu'un bon chasseur connaît avant toutes choses les routines de son gibier. C'est d'ailleurs ce qui en fait un excellent chasseur. Si tu te souviens du cheminement que j'ai emprunté pour t'enseigner la chasse, alors tu dois pouvoir comprendre cela. En tout premier lieu je t'ai appris à fabriquer des pièges, à les installer, et alors je t'ai montré les routines de l'animal à chasser ; enfin nous avons vérifié l'efficacité de nos pièges contre leurs routines. C'est ce qui constitue les formes extérieures de la chasse. Maintenant il me faut t'enseigner la dernière et sans doute la plus difficile partie de la chasse. Avant que tu ne puisses vraiment la saisir et prétendre être un chasseur, il s'écoulera bien des années. Être un chasseur n'est pas simplement une question de pièges. Un chasseur qui vaut son pesant d'or n'attrape pas son gibier parce qu'il pose des pièges ou parce qu'il connaît les routines de ses proies, mais parce que lui-même n'a pas de routines. C'est là son suprême avantage. Il n'est absolument pas comme les animaux qu'il traque, ordonnées selon de pesantes routines et des astuces facilement prévisibles. Il est libre, fluide, imprévisible.

- Tous nous agissons à l'instar des proies que nous poursuivons, ce qui, bien évidemment, fait de nous la proie de quelque chose ou de quelqu'un d'autre...

Comme les animaux, les humains sont des êtres de routine. Nous sommes enclins à en établir en toute chose : nature de notre alimentation, endroits que nous fréquentons, et jusqu'à nos façons de dormir. Tout se transforme en routine : ce que nous pensons, ce dont nous parlons, ce que nous désirons, ce que nous détestons; et même notre manière d'exprimer nos sentiments et de vivre nos affections. Quand nous arrivons dans un endroit où il nous faudra revenir fréquemment, nous choisissons immédiatement  un coin que nous considérons comme le nôtre. S'il s'agit d'un fauteuil, nous nous assoirons toujours sur le même.

Les routines de notre vie n'englobent pas seulement les activités que nous déployons dans le monde, comme aller travailler, manger à heures fixes, dormir dans la même maison, etc. ; elles englobent aussi tous les plis et les tics avec lesquels nous abordons tout ce que nous faisons. C'est pourquoi tout un chacun, pendant sa vie, doit affronter, périodiquement, les mêmes problèmes ; les jours s'écoulent en redites, en recommencements, nous parcourons toujours le même chemin, butons toujours sur le même obstacle, jusqu'à ce que nous soyons trop âgés ou trop épuisés pour rompre avec nos vieilles routines, et nous restons alors couchés, en attendant, tout simplement, notre fin.

En devenant des êtres humains non routiniers, nous nous transformons en revanche en êtres magiques.

Technique

Il est parfois très difficile de se défaire de ses routines, parce qu'elles sont tout ce qui donne un sens à nos vies d'hommes ordinaires. Il suffit de songer à certaines d'entre elles : se plaindre, fumer, se mettre en colère, critiquer, manger à l'excès, veiller trop tard, pour mesurer les difficultés que leur abandon implique. Mais il n'est pas impossible d'y parvenir grâce à une stratégie adéquate.

La principale stratégie du chasseur consiste à se guetter soi-même ; à guetter ses habitudes. En agissant ainsi, on peut observer attentivement comment elles se déclenchent. On s'avise ainsi que les habitudes, comme tous les autres actes, ont leurs composants ; et un acte, comme tout mécanisme automatique, ne peut être opérant sans tous ses composants. Si nous désirons nous défaire d'une habitude, il nous suffit, au lieu de nous opposer violemment à elle, de lui retirer l'un de ses composants, et l'acte ne pourra se produire.

Parmi ces composants, j'ai remarqué que certains reviennent plus souvent que d'autres : état de fatigue, manque de présence, respiration inconsciente, manque de présence, pensée inconsciente, manque de présence, parole inconsciente, manque de présence, acte inconscient...

Par ailleurs, le meilleur moyen d'avoir moins de routines, c'est peut-être d'oser, d'imaginer agir autrement... voire de se laisser entraîner par le courant de la Vie plutôt que de sans cesse lutter contre pour maintenir sa Routine sclérosante...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire